Au procès du château de la Rochepot, le faux mort se défausse et tente de brouiller les pistes

Une arrivée “rocambolesque” en France et une mémoire sélective: le principal prévenu ukrainien d’un procès pour blanchiment d’argent lors de l’achat du château de la Rochepot, joyau de la Bourgogne, s’est expliqué mardi à Nancy, tentant de se défausser sur ses co-prévenus et de brouiller les pistes.

“Je ne me souviens pas”, “peut-être”, “probablement”, répond souvent Dmitri Malinovsky aux questions de la présidente, Brigitte Roux, qui a tenté d’éclaircir les choses tout au long de cette deuxième journée d’audience au tribunal correctionnel.

Ce procès de sept personnes, prévu pour durer deux semaines, doit faire la lumière sur l’origine des fonds utilisés pour l’achat en 2015 de la forteresse néo-gothique du XIIe siècle, restée en vente trois ans.

Longuement interrogé sur son parcours, son départ d’Ukraine puis son arrivée en France, Dmitri Malinovsky a livré une histoire “rocambolesque”, selon Mme Roux : après s’être fait casser la jambe lors d’un règlement de compte par son ancien associé ukrainien en janvier 2014, il aurait ensuite été kidnappé en août. Retenu en Hongrie, il aurait réussi à s’enfuir en décembre de la même année, dérobant un sac à ses ravisseurs contenant une arme, de l’argent et un faux passeport roumain.

Un faux qu’il utilisera ensuite en France, où il arrive en mai 2015, “une question de vie ou de mort” selon lui, car il était “menacé”, bien qu’il n’aime pas “enfreindre la loi”.

Sa mort présumée, accréditée à cette période par un faux certificat de décès délivré par des “fonctionnaires corrompus”, est un coup monté, jure-t-il aussi, sans donner d’explications très claires.

– Hôtels de luxe et bijoux –

Pour l’argent qui a servi à acheter le château de La Rochepot en 2015, Dmitri Malinovsky charge ses parents, ses amis, ses proches. Tous ces projets ne sont pas les siens, il accompagne juste une amie de sa femme, Katerina Rusanova, elle aussi sur le banc des prévenus, et ses parents lui apportent de l’argent car il n’a pas de compte en banque.

Selon l’accusation, cet argent provenait d’une escroquerie: M. Malinovsky aurait soutiré plus de 12 millions d’euros à une société de fertilisants basée à Singapour, dont l’actionnaire majoritaire est un ressortissant russe.

A propos des armes retrouvées dans des sacs Hermès au château ? Pas les siennes, jamais vu, de toute façon il ne sait pas s’en servir et n’a pas fait son service militaire, et il est “un homme paisible”.

Interrogé sur les abus de biens sociaux, dont il est accusé, il a répondu que c’était des “services rendus” par la SARL qui exploitait le château. Il a raconté que ses parents effectuaient des virements depuis leurs comptes personnels vers cette société, afin de payer les dépenses de leur fils et de sa famille.

Parmi ces dépenses, des séjours dans des hôtels cinq étoiles, des repas dans des restaurants haut de gamme, mais aussi des bijoux, des montres de luxe et des sacs Hermès pour sa maîtresse d’alors, Olga Kalina.

Pourtant, quand la présidente lui fait remarquer qu’il a “une vie extrêmement agréable, d’un certain standing”, il lui répond aussitôt qu’il “n’apprécie pas les choses matérielles”.

Pour le procureur, Vincent Legaut, ce train de vie montre que Dmitri ne semblait pas “se dissimuler”, mais l’emploi de la carte bancaire de la SARL “est l’exemple même de sa volonté de ne laisser aucune trace de ses dépenses”.

Une méthode justifiée par l’intéressé encore une fois pour des raisons de sécurité, car sa vie “était menacée, donc je ne laissais aucune trace sous mon identité”. “Je n’ai jamais réservé les hôtels en mon nom mais je ne me cachais pas non plus dans les sous-sols”, a rétorqué Dmitri Malinovsky au ministère public.

L’Ukrainien a été arrêté en 2018 et le château saisi et vidé, au grand dam des habitants de cette commune, qui voyaient défiler quelque 30.000 touristes par an grâce à cette bâtisse au coeur de la Bourgogne viticole.

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